Après la Libération, la seconde chambre du Parlement présente un visage renouvelé. En effet, lors du renouvellement de 1946 et pour la première fois, 21 femmes, nouvellement élues au Conseil de la République, font leur entrée au Palais du Luxembourg.

Le sénateur Louis MARTIN, accompagné d’une délégation féministe, sortant du Petit Luxembourg le 21 juin 1932. – © gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France

Dès la Révolution française, l’accès des femmes au droit de vote et aux fonctions électives est une revendication portée par des féministes. Olympe de GOUGES affirme dans une formule cinglante, à l’article 10 de sa Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne que la femme ayant « le droit de monter à l’échafaud, elle doit avoir également celui de monter à la Tribune ».

La revendication du droit de vote des femmes en France perdure au XIXe siècle et devient encore plus pressante au début du XXe siècle, au fur et à mesure que les pays voisins le leur accordent progressivement.

Durant l’entre-deux-guerres, ce combat politique est soutenu par certains sénateurs. Louis MARTIN, sénateur du Var, rassemble autour de lui un groupe de 80 parlementaires en faveur du droit des femmes. De 1927 à 1935, il demande chaque année, inlassablement mais en vain, l’inscription à l’ordre du jour de la proposition de loi tendant à reconnaître aux femmes le droit de vote et d'éligibilité.

Le rôle des femmes dans la Résistance durant la Seconde Guerre mondiale entraîne un basculement irréversible en faveur de la reconnaissance de leur droit de vote. Dès le 23 juin 1942, dans une déclaration publiée dans les journaux clandestins, le général de GAULLE affirme : « Une fois l'ennemi chassé du territoire, tous les hommes et toutes les femmes de chez nous éliront l'Assemblée nationale qui décidera souverainement des destinées du pays ». Cette déclaration trouve sa traduction concrète, le 21 avril 1944, dans l'ordonnance du Comité français de la libération nationale, signée par le même général de GAULLE à Alger, par laquelle les femmes obtiennent le droit de vote et d'éligibilité.

Le 21 octobre 1945, les premières élections législatives après la Libération voient entrer 33 femmes au Palais Bourbon. L’année suivante, à l’occasion des élections au Conseil de la République, ce sont 21 femmes qui font leur entrée au Palais du Luxembourg. Majoritairement issues de la Résistance ces élues siègent de chaque côté de l’hémicycle. Dix d’entre elles, soit près de la moitié, sont communistes : Marcelle BOUVET, Mariette BRION, Alice BRISSET, Isabelle CLAEYS, Yvonne DUMONT, Suzanne GIRAULT, Maria PACAUT, Germaine PICAN, Maria ROCHE et Jeanne VIGIER. Les autres proviennent d’horizons politiques différents : trois sont membres du groupe socialiste (Gilberte BROSSOLETTE, Eugénie EBOUE-TELL et Marie OYON) ; l’une, Jane VIALLE, est apparentée au groupe socialiste, deux sont membres du groupe du Rassemblement des gauches républicaines (Claire SAUNIER et Jacqueline THOME-PATENOTRE), quatre sont inscrites au groupe du Mouvement républicain populaire (Marie-Hélène CARDOT, Marie-Hélène LEFAUCHEUX, Simone ROLLIN et Anne-Marie TRINQUIER) tandis que Marcelle DEVAUD, siège parmi les membres du groupe du Parti républicain de la liberté.

Deux de ces pionnières accèdent à la vice-présidence sous la IVe République : Gilberte BROSSOLETTE dès 1946 et jusqu’en 1954, Marcelle DEVAUD de 1948 à 1951. Quant à Marie-Hélène CARDOT, elle exerce cette fonction de 1959 à 1968.