En 1945, la sécurité sociale des étudiants n’avait pas été intégrée au régime général, afin de prendre en compte leurs besoins spécifiques. Cinquante ans après sa création, le régime étudiant faisait l’objet de nombreuses critiques et ne fonctionnait plus de façon satisfaisante : il devenait urgent de le réformer en profondeur.

Extrait du Courrier de l’étudiant, numéro du 15 mai 1946 - © gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France

À la Libération, l’ordonnance du 19 octobre 1945 du Gouvernement provisoire de la République française établit le régime général de la sécurité sociale. L’Union nationale des étudiants de France (UNEF) mène alors une campagne de communication intense en faveur d’un traitement distinct de la protection sociale étudiante. La loi du 23 septembre 1948 répond finalement à ses attentes : la sécurité sociale étudiante est créée et sa gestion confiée à une mutuelle, la Mutuelle nationale des étudiants de France (MNEF) issue de l’UNEF.

En 1970, alors que l’UNEF revendique la politisation de la MNEF, par ailleurs confrontée à des difficultés économiques, le gouvernement autorise la création d’une seconde structure de gestion : les Sociétés mutualistes étudiantes régionales (SMER) fédérées au niveau national. 

À la fin des années 1990, plusieurs affaires ébranlent la crédibilité du régime de protection sociale des étudiants, avant d’entraîner l’ouverture d’une information judicaire. Dans ce contexte, intervient la disparition de la MNEF en 2000, et la création de La Mutuelle des étudiants (LMDE).

Pour autant, le système de sécurité sociale étudiant continue de faire l’objet de nombreuses critiques, de la part des utilisateurs comme de la Cour des comptes, à cause de son coût excessif et de ses dysfonctionnements.

La commission des Affaires sociales du Sénat constitue, en février 2012, un groupe de travail consacré à la sécurité sociale et à la santé des étudiants. Ce groupe de travail confie à ses deux rapporteurs, M. Ronan KERDRAON et Mme Catherine PROCACCIA, le soin de conduire un vaste programme d’auditions. 

Dans leur rapport d’information publié le 12 décembre 2012, les deux sénateurs soulignent les problèmes rencontrés (coût excessif, délais d’obtention de la carte vitale, de remboursement ou encore temps de réponse très longs, dossiers égarés) et qualifient la sécurité sociale étudiante de « système ancien et d’une complexité abracadabrante ». Ils estiment que les mutuelles étudiantes sont incapables de mener à bien leur mission. Plusieurs scénarios d’évolution sont proposés y compris la suppression du régime spécifique des étudiants en les affiliant, à titre indépendant, au régime de leurs parents (rapport consultable sur le site du Sénat). 

Le 17 juin 2014, Mme Catherine PROCACCIA dépose une proposition de loi tendant à réformer le système de sécurité sociale des étudiants, par le biais de la suppression du système délégué de sécurité sociale étudiante. Elle préconise que les étudiants restent rattachés, mais de façon indépendante, au régime de sécurité sociale de leurs parents (article 1er), et versent une cotisation forfaitaire en début d’année universitaire, à l’exclusion des boursiers (article 2) ainsi que la suppression des mutuelles étudiantes (articles 3 et 4).

La démarche aboutit en 2018, avec l’adoption de la loi relative à l’orientation et à la réussite des étudiants (loi n° 2018-166 du 8 mars 2018 dont le dossier législatif est consultable sur le site du Sénat) qui rattache les étudiants au régime général de sécurité sociale, marquant ainsi la fin d’un régime spécifique qui, au-delà de son caractère unique en Europe et de ses dysfonctionnements, ne donnait plus satisfaction à ses assurés sociaux.