Jacques Bloch naît le 7 juillet 1924 à Paris, dans une famille d’origine juive qui quitte l’Alsace-Lorraine en 1871 pour rester française. La Seconde guerre mondiale va l'amener à entrer dans la Résistance.
Médaille de la Résistance française - © Musée de l'Ordre de la Libération
Deux de ses oncles sont morts au combat pendant la Première guerre mondiale tandis que son père, Marc-André Bloch, engagé volontaire, sert quatre ans comme artilleur. Rappelé en 1939, il est fait prisonnier lors de la bataille des Ardennes en 1940. Libéré en 1941, Marc-André Bloch est révoqué de son poste de professeur de philosophie au lycée Lakanal de Sceaux, parce que juif. Deux jours plus tard, la maison familiale est réquisitionnée par les Allemands : les Bloch se réfugient à Thilouze, en Touraine. En février 1942, la famille doit s’enfuir à nouveau. Elle échappe, en effet, de peu à la déportation grâce au garde champêtre du village qui les avertit de leur arrestation imminente. Passant la zone de démarcation en pleine nuit, la famille trouve refuge dans la Creuse chez Marc Bloch, le grand historien, cofondateur des Annales, qui va influencer et déterminer l’avenir du jeune Jacques Bloch.
Jacques, empreint des valeurs républicaines de ses parents (son père n’hésite pas à se mettre en danger pour aider les évadés des camps de prisonniers de guerre quelle que soit leur confession ou leur nationalité), entre à vingt ans dans l’armée des ombres, grâce à Marc Bloch, cousin de son père, résistant lui-même, fusillé en 1944 par la Gestapo.
Celui qui se nomme dorénavant Jacques Binet est chargé de la section parachutage de nuit des cargaisons destinées à la Résistance.
Il participe à la libération de Guéret, le 7 juin 1944, au cours de laquelle il est gravement blessé par une rafale de mitraillette. Son bras droit est en partie amputé. A la suite de la dénonciation d’un milicien, il est arrêté par la Gestapo, torturé pendant sept jours, avant d’être déporté à Buchenwald en septembre 1944, sous le matricule 85235, muni d’un triangle rouge réservé aux prisonniers politiques. Ses faux papiers le sauvent d’une mort certaine : les allemands ne savent pas qu’il est juif.
En avril 1945, les Allemands qui se savent vaincus, évacuent précipitamment le camp de Buchenwald, ce qui donne l’occasion à Jacques Bloch de s’échapper avec un camarade de captivité. Sur cette route de la mort où de nombreux prisonniers meurent d’épuisement ou sont abattus par les Allemands, les deux évadés rencontrent des prisonniers de guerre qui, profitant de la confusion, se sont emparés d’un camion de la Wehrmacht. Ils rejoignent ainsi - à pied - les forces armées américaines entre la République tchèque et l'Allemagne, avant de revenir à Paris.
En 1946, Jacques Bloch, âgé de 22 ans, est décoré de la médaille de la Résistance française, de la médaille des évadés, de la croix de guerre avec palme et étoile de bronze. Le général de Gaulle le nomme chevalier de l’ordre de la Légion d’honneur. Il sait que la mutilation de son bras l’oblige à renoncer à devenir médecin, sa première passion. Bachelier de philosophie, il suit alors des cours de droit et entre le 27 novembre 1946 au Conseil de la République, en tant qu’administrateur-adjoint. Il sert l’administration sénatoriale pendant plus de quarante ans et gravit tous les échelons d’une brillante carrière. Quand il quitte le Sénat, en 1990, il est directeur du service des commissions.
Jacques Bloch décède le samedi 28 janvier 2023.
Ses obsèques ont eu lieu le 2 février aux Invalides. Dans un communiqué, l'Élysée rend hommage au résistant : « Le Président de la République salue cette haute figure résistante, qui ne s’abstint d’aucun sacrifice pour défendre la patrie et la République, et dont l’épopée de combat et d’engagement demeurera un exemple ».