Né en Seine-et-Oise au milieu du XIXe siècle, Paul DECAUVILLE est un homme accompli : tour à tour agriculteur, ingénieur, industriel, sénateur, écrivain et fabricant de cycles, il a inventé un chemin de fer à voie étroite qui porte son nom.

Tintin au pays de l’Or Noir (1950) - © Hergé/Tintinimaginatio 2025

À la mort de son père, en 1871, Paul DECAUVILLE (1846-1922) reprend l’exploitation familiale de betteraves sucrières, dans le village de Petit-Bourg en Seine-et-Oise. Soucieux de faciliter le transport des betteraves dès leur sortie de terre, il invente un chemin de fer portatif à voie étroite pour relier les champs aux bâtiments de la ferme.

Il présente cette invention à l’Exposition universelle de 1878 et obtient une médaille d’or. Grâce à son faible encombrement, ce train est l’outil idéal pour travailler dans les mines, les usines et pour desservir les ouvrages militaires. Son chemin de fer remporte un tel succès que Paul DECAUVILLE abandonne la culture des betteraves sucrières pour s’installer comme industriel. Il crée une usine dans son village de Petit-Bourg pour la fabrication de sa voie ferrée mobile, dont les éléments métalliques se démontent et se transportent facilement. 

En 1881, il est élu maire de sa commune, qu’il rebaptise Évry-Petit-Bourg. Il poursuit, aux portes de Corbeil, commune voisine, le développement de son affaire et fait de ses établissements industriels une usine modèle comprenant maisons d'ouvriers, restaurant d’entreprise, théâtre, cabinet médical, infirmerie et société coopérative permettant aux ouvriers d’acheter à moindre coût des denrées alimentaires.

Candidat aux élections sénatoriales en 1889, Paul DECAUVILLE est élu sénateur de Seine-et-Oise, puis réélu en 1891, et siège au centre gauche. Membre de la commission générale des douanes, il travaille sur des sujets familiers : les mélasses, les machines mécaniques, la wagonnerie, mais aussi variés : l’orfèvrerie, l’horlogerie, la bijouterie et les monnaies. En 1893, il prononce une intervention très remarquée dans la discussion du projet de loi ayant pour objet de concéder diverses lignes de chemins de fer à la Compagnie d'Orléans. 

Il intervient également en séance publique pour défendre la culture des plantes médicinales. Les terres agricoles de Seine-et-Oise n’étant pas destinées à la grande production céréalière, les agriculteurs de ce département se consacrent à la culture de la racine de guimauve, de la grande absinthe, de la menthe... très appréciées des herboristes et des pharmaciens. Cependant, la concurrence est rude et Paul DECAUVILLE souhaite appliquer des droits de douane aux importations de plantes belges et allemandes afin de protéger la production locale. Mais le rapporteur Pierre ISAAC s’y oppose et l’amendement est rejeté.

Pendant son mandat sénatorial, Paul DECAUVILLE écrit deux ouvrages, intitulés Mémoire sur la culture à vapeur (1890) et Mon premier voyage aérien (1896). Après avoir exercé les fonctions de secrétaire du Sénat de 1897 à 1899, et celle de secrétaire de l’Assemblée nationale réunie à Versailles pour l’élection du Président de la République, Émile LOUBET, Paul DECAUVILLE renonce à se présenter au renouvellement sénatorial de 1900.

Il retourne à la vie civile et se consacre à ses affaires qui se sont étendues à la fabrication de cycles et de voiturettes automobiles. Sa société participe même, en 1899, à la course Nice-Castellane, où l’une des trois automobiles Decauville en lice arrive en quinzième position, malgré la chute du conducteur qui s’est cassé le bras.

En 1910, Paul DECAUVILLE fonde une société de travaux publics, le Comptoir d'outillage et de matériel à air comprimé, qui lui permet d'exploiter ses brevets. Un an après sa mort, qui survient en 1922, la toute nouvelle usine Decauville de Marquette-lez-Lille (Nord) entre en activité. Elle produira des engins de travaux publics et du matériel minier jusqu’en 1968.